À Meyzieu, Nicolas Daubanes renoue avec sa première expérience décisive de projet co-construit à l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Lavaur en 2008. Il n'a eu de cesse depuis de s’immerger dans des environnements singuliers tels que les institutions et lieux disciplinaires, qui lui permettent d’explorer la fragilité de la condition humaine dans ses aspects les plus inquiétants, mais aussi les plus remarquables.
À l'issue de chaque expérience, souvent réalisée in situ et au plus près de celles et ceux qui vivent dans ces espaces, la liberté pointe comme un horizon incontestable malgré les contraintes. De manière générale, les processus artistiques de Nicolas Daubanes prennent en considération des situations spécifiques que l’artiste choisit d’aborder pour leur charge mémorielle ou émotionnelle, leur potentiel antagoniste et conflictuel ou encore leur capacité à dessiner les contours d’un paysage des lieux de vie en commun et de leur révolution souterraine.
Après sa première visite à l’EPM de Meyzieu et au quartier du Mathiolan, l’artiste a choisi d’orienter son projet autour de la constitution collective d'un codex. Ancêtre du livre moderne réalisé d'abord par l'assemblage de tablettes de bois puis par celui de feuilles de parchemin reliées en cahiers, le codex a été inventé par les Romains pour remplacer le rouleau de papyrus. S'y trouvaient consignés autant des éléments de comptabilité ou d'inventaire, que des chroniques historiques ou des ensembles de connaissances, cette dernière approche correspondant encore à l’usage contemporain du terme qui désigne désormais les recueils de formules pharmaceutiques, les manuels médicaux ou encore les ouvrages rassemblant les lois (code).
De cette histoire, Nicolas Daubanes souhaite retenir deux éléments fondamentaux : l’écriture manuscrite en invitant les participant·e·s à devenir copistes et la compilation de connaissances que ces mêmes participant·e·s seront convié·e·s à partager. Les ateliers collectifs proposés pour y parvenir seront conçus comme des universités populaires qui valoriseront les savoir-faire techniques, humains, sociaux, artistiques, ordinaires et extraordinaires de chacun·e. Chaque contribution prendra la forme d’une page manuscrite présentant chaque geste, chaque action, chaque savoir partagé. L’atelier, nommé Université de (lieux d'interventions à Meyzieu), et toutes les pages récoltées seront ensuite rassemblées dans un « Codex des Universités » unique et précieux, jamais imprimé afin de conserver toute son aura et ne pouvant être consulté qu'au sein d'une seule collection à la demande.
Dans le cadre de Culture Justice soutenu par la DRAC Auvergne - Rhône-Alpes, la Région Auvergne Rhône-Alpes et la PJJ.
Visuel : Journal clandestin de la prison d'Eysses, 1943 (extrait)