Lyon
La 16e édition de la Biennale de Lyon s’inspire de l’histoire complexe de Lyon. De la glorieuse colonie romaine de Lugdunum jusqu’aux frères Lumière qui ont offert au monde les premiers films, de Napoléon en exil prononçant cette déclaration d’amour : “J’aime fort les Lyonnais, ils me le rendent bien” jusqu’à Louise Brunet la méconnue que le périlleux voyage vers Beyrouth a conduite jusqu’aux usines de soie du Mont-Liban, le destin de Lyon est indissociable de celles et ceux qui l’ont traversée et marquée de leurs originalités, de leurs bizarreries et de leurs destinées souvent romanesques.
En invoquant ces multiples histoires, la 16e Biennale de Lyon explore la fragilité, à la recherche de connexions au-delà des limites de la géographie et du temps.
Puisant dans la richesse des collections des musées de Lyon et d’ailleurs, la Biennale de Lyon a pour objectif d’initier une nouvelle lecture des oeuvres et des récits qu’incarnent ces institutions.
Fragilité
Notre fragilité est universelle – elle est ressentie partout et par tous, quel que soit le contexte dans lequel elle se révèle. Le corps en porte l’illustration. Qu’il soit racisé, genré, colonisé ou surexploité, le corps est le premier des nombreux lieux où les conflits font rage et se dénouent, où la maladie empire et se soigne, et où la vie, dans toute sa complexité, débute et s’achève. Les différentes strates de la société sont tout aussi fragiles, en particulier sur la ligne de crête qui sépare les nantis des démunis. L’agitation civile croissante suscitée par le refus de répondre aux injustices d’un autre âge et aux iniquités systématiques, renforce l’instabilité du tissu social.
Qu’elle se niche dans le corps meurtri d’un manifestant ou dans le ciel empli de cendres qui surplombe la surface enflammée de la terre, la conscience de notre précarité commune a rarement été aussi tangible et visible. La fragilité est inévitable et inhérente à notre planète.
Dans ce nouveau scénario, le véritable pouvoir n’a pas pour but de conquérir de nouvelles frontières mais celui de poursuivre sa marche vers une sorte de paix intérieure.
Temps
La 16e Biennale de Lyon considère que les artistes d’hier et d’aujourd’hui comptent souvent parmi les voix les plus vulnérables de nos sociétés. Cette vulnérabilité va de pair avec celle des objets et oeuvres d’art ainsi créées. Bibliothèques et musées sont les temples de ces témoignages temporaires que nous léguons aux générations futures, dans l’espoir que leurs héritages survivent à notre propre mortalité. De même, la nouveauté nous enchante, au risque de nous faire perdre notre capacité à apprécier la contemporanéité de toute forme d’art.
En abordant de front ces impulsions contradictoires, la 16e Biennale de Lyon rassemble des oeuvres d’art et des objets qui couvrent des géographies composites sur plusieurs millénaires et qui déploient desrécits intemporels faits de vulnérabilité et de persévérance. Puisant dans la richesse des collections des musées de Lyon et d’ailleurs, la Biennale de Lyon a pour objectif d’initier une nouvelle lecture des oeuvres et des récits qu’incarnent ces institutions.
Faite de cycles éternels, notre fragilité revient constamment sur le devant de la scène : elle nous regarde droit dans les yeux, puis semble disparaître. Elle persiste sous la peau épaisse du temps, impassible mais bel et bien présente, silencieuse mais jamais réduite au silence.
Résistance
La 16e Biennale de Lyon rassemble de nombreux objets et pratiques créatives qui incarnent la nature fragile et fugace de notre existence. Ces pratiques évoquent la vulnérabilité des personnes et des lieux, mettent à nu leurs cicatrices et leurs difformités, témoignent de leurs tourments ou attirent simplement l’attention sur les traces indélébiles du temps. Que deviendrait notre monde si, au lieu de considérer la vulnérabilité comme une marque de faiblesse, nous l’exploitions pour tenter de reprendre le pouvoir ?
Dans ce nouveau scénario, le véritable pouvoir n’a pas pour but de conquérir de nouvelles frontières mais celui de poursuivre sa marche vers une sorte de paix intérieure. La Biennale propose une déclaration collective étayée par des voix résilientes – des voix qui se nourrissent de tendresse et s’épanouissent dans l’adversité. Une communauté qui respecte la fragilité, se forme là où le mot, l’image, le son et le mouvement se rejoignent, aboutissant à la rédaction d’un manifeste de la fragilité pour un avenir collectif.